Grosse bouffe
Bébé toujours malade, je me retrouve seule avec lui dans le
petit nid ce week-end… Il m’évite le grand banquet familial de l’année, c’est
déjà ça de gagné. J’aime pas les grands banquets. On sait jamais à côté de qui
ont va se retrouver assis, et c'est rarement une bonne surprise... Ce qui fait qu’au lieu d’être face à sa Cousine
Préférée qui habite à l’autre bout de la France et qu’on ne peut voir qu’à
cette occasion, on se retrouve à côté des gens qu’on connait pas du tout, « pour
faire connaissance ». Mais vu que la musique est assourdissante le
dialogue est nul. La communication se limitera à quelques sourires entendus, ou
gênés, ou (faussement) complices, ou gourmands face à la bonne chère. Ou gênés.
Pendant ce temps, Cousine Préférée se tape mamie Nénète qui est adorable mais
sourde.
Quand on est célibataire, comme si c’était pas déjà assez dur à vivre dans
ce genre d’occasions, on est parfois placé avec les enfants, ou au bout de la
table face au bouquet de fleurs géant (on sent le vécu là ?). Bouquet de
fleur qu’on met par terre dès qu’on en a l’occasion, parce que quand même on a
l’air con là derrière, tout seul, et qu’on retrouve posé triomphant sur la
table dès la place abandonnée pour quelques secondes (ex : pause toilette,
ou déplacement vers le buffet, ou vers Cousine Préférée)… Comme par magie
il réapparait, toujours plus imposant, surement grâce à Tatie Maniaque des
bouquets, « c’est tellement plus gai ». Mais pas très bavard. Ou pire
que le bouquet de fleur, on peut aussi se retrouver face au cousin X et sa femme C, beaucoup moins causants, qui n’ouvrent pas la bouche une fois
en 4 heures pour autre chose qu’avaler ou sourire gentillement (sans répondre)
quand on leur pose une question.
Et gauloisement, manger et boire, boire et manger, pendant de longues heures, envahis
par les blagues vaseuses et les haleines avinées. On va sans doute se demander
dans quelle famille je vis. Tout ce qu’il y a de plus normale, seulement voilà ils
sont nombreux, donc ça fait beaucoup de connerie réunie, le vin déliant les
langues.
Quelques exemples pour souvenirs :
« Il serait pas un peu gris ce bébé-là ? » - oncle Beauf, face à
Crapaud et ses yeux noirs.
« La chenille, la chenille, la chenille… ! » - n’importe quelle sono
dans ces cas-là.
« Toi, j’t’aime pas » - oncle Chevelu, face à ma mère, qui n’a jamais
oublié, ni pardonné.
« Et pourquoi tu veux pas boire, t’es coincée du cul ou quoi ? »
- cette fois c’est cousin Beauf, mais il est éloigné celui-là...
« Tu as redoublée ta 4ème ? Tu as dû devenir bête depuis l’école
primaire quand tu avais sauté une classe… » - Tata Marcelle, ou comment
vous complexer pendant des années.
« Mange-donc, t’es tellement maigre ! » - Ô combien de vieilles
tatas, ou comment vous complexer pendant…
« Va falloir boire de la bière pour faire pousser tout ça » -
Celui-là n’était pas de ma famille, Dieu soit loué…
Enfin bref, tout ça pour dire que si Crapaud ne crachait pas ses poumons, je sauterais de joie !